31/03/2011

IRL #13

Je change. Ma vie change. Le monde change. Mes amis commencent à s'apercevoir que tout ça a changé, que la pleurnicharde d'il y a trois mois est en train de mourir. A la place un corps qui s'accepte, qui demande à découvrir, ne plus effleurer ses désirs ni sa sexualité, plonger dedans, y goûter, la dévorer, encore et encore. A la place un affect qui s'est rendu compte qu'à force de trop s'inquiéter les gens fuyaient, ou n'osaient pas s'approcher. A la place un intellect qui essaie de relativiser, tout relativiser, oui la vie est très dure et oui l'indépendance, vive l'indépendance, même au prix de tant de choses l'indépendance. Ne plus pleurer pour rien. Ne plus se plaindre de tout ce qu'on possède, car tout ce qu'on possède, même quand ce n'est pas grand chose, est richesse immense. Relever la tête. On s'attendra de nouveau à tomber quelquefois, de nouveau à désespérer, mais on l'accepte désormais. Sans ombre il n'y a pas de lumière, disait cet ami-là. Quelquefois des coups durs -oh tellement, tellement de coups durs en si peu de temps- mais oui, toujours relativiser : le monde est un changement perpétuel, l'instant d'après ne sera pas aussi difficile et même s'il l'est, même s'il est même encore plus dur, les belles choses continuent d'apaiser la douleur immense.
Voilà, Papa, tout ce que tu m'as appris depuis que tu es parti. Nous ne discutions pour ainsi dire jamais, mais maintenant que tu vois tout, de là-haut, tout autour du monde et de moi, de nous, tu m'as envoyé tout ça. Je commence à peine à me faire à l'idée que tu as disparu, que jamais plus tes mails ni ta voix. De temps en temps la larme à l'oeil. Je ne sais pas si c'est du manque, c'est peut-être juste constater que la vie continue irrémédiablement, fauche irrémédiablement, parfois quand on ne s'y attend pas. Alors profiter, aimer, danser, rire, pleurer, se mettre en colère, faire l'amour, faire la guerre, et profiter de tout ça.
Je me remets à écrire.
J'aime Paris à folie. Paris est pleine de vie. Qu'il s'agisse de contempler le lever ou le coucher de soleil d'un pont ou d'un autre, de faire du vélo toute la nuit, de découvrir un autre et de prendre son temps, d'accepter que tomber dans des bras peut prendre du temps, de simplement errer, de boire des vodkas bizarres ou de hurler d'émerveillement devant tant de lumières, tant de beautés, fragiles et instables, c'est là qu'est la vie. C'est là qu'est ma vie, à présent.